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édito

Aubry : plus royaliste que le roi

jeudi 30 juin 2011


Du 28 avril au 23 juin dernier, Martine Aubry et toute l’équipe municipale de la ville de Lille étaient en tournée pour promouvoir le « bilan de mi-mandat » de la majorité PCF-PS-Verts-Modem élue en 2008. Avec force communication et petits fours, la tournée d’auto-promotion de la récente candidate à l’élection pestilentielle s’est attachée à développer ses trois axes « prioritaires » : réaménagement urbain, politique de l’emploi et sécurité. Trois axes qui cachent en fait une seule et même politique de gentrification — ou pour le dire en des termes moins pompeux —, une politique visant à installer les riches et les entrepreneurs dans le coeur de la ville, tandis que les plus pauvres d’entre nous se voient repoussés toujours plus loin en périphérie.

Sur le réaménagement urbain d’abord, la mairie prévoit la construction de 3 400 logements sur la durée de son mandat. Ce vaste projet de réaménagement urbain, ceintures « verte » et « bleue » comprises [1], s’apparente sur bien des points à un nettoyage de façade destiné à attirer investisseurs et capitaux. Et tant pis pour ceux et celles qui ne pourront encaisser la flambée des prix de l’immobilier qui ne manquera pas de se manifester : illes iront loger ailleurs. Lille doit être une ville « attractive », « compétitive ». Lille 3000 et la gare Saint-Sauveur ont servi de produit d’appel, Euratechnologie [2] et le futur Grand Stade ne feront que parachever le travail. D’ailleurs depuis peu, la ville de Lille est passée devant Lyon en surface de bureaux disponible. Mais pour qui roulent ces élus qui se présentent devant nous le cœur sur la main ? Avec leurs zones franches, leurs partenariats et leurs aides à la création d’entreprises, ils ressemblent à s’y méprendre à de vrais petits VRP, se servant de leur ville comme d’une image de marque qu’il faut refourguer à la première grosse enseigne venue. Au plus grand bonheur de Partouche, Décathlon et Édouard Leclerc.

En matière de sécurité, il y a maintenant quelques années que le Parti Socialiste a compris que pour gagner une élection, il devait lui aussi assumer son rôle de gendarme et rassurer l’électorat conservateur. Damant le pion à Nicolas Sarkozy, Martine Aubry s’est exclamée, lors de chacune de ses réunions publiques : « il nous manque 400 policiers à Lille, des postes que le gouvernement a supprimé ». En ligne de mire les nuisances sonores et « les risques d’accidents provoqués par les scooters et autres quads ». On croit rêver. Tous les prétextes sont bons pour foutre des keufs partout et encore plus dans les quartiers populaires. Le PS n’échappe pas à la règle. Par contre il fait silence sur l’affaire Hakim Djelassi, cet habitant du Vieux Lille de 31 ans retrouvé mort dans un fourgon de police en novembre 2009.

Finalement, avec une majorité ratissant aussi large et une opposition de droite qui n’a de toutes façons rien à redire aux projets en cours, la municipalité a le champ libre. On aurait tort de croire le PS incapable d’être lui aussi un bon petit gestionnaire de ville modèle : aseptisée, froide et fliquée mais toute ouverte aux investisseurs. Au contraire, son rôle à Lille, comme à Paris, Lyon, Nantes, Angers ou Dijon, est d’attirer la classe moyenne supérieure, étape nécessaire à la « dynamique » des grandes métropoles. Au regard de ce bilan de mi-mandat, on ne peut qu’être d’accord avec les lèche-bottes de la majorité municipale : Aubry est prête pour le grand bain.

Notes

[1Comprendre : on va planter des arbres et remettre en eaux l’avenue du Peuple belge pour faire plaisir aux touristes et à l’adjoint, Pierre de Saintignon.

[2Parc d’activités situé aux Bois Blancs et dédié aux Technologies de l’information et de la communication (TIC). « Innovation » et « Excellence » sont ses mots d’ordre.